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Mis en ligne dans le kiosque le 13 janvier 2007.

Pascal Sevran, incident clos

Nous souhaitons apporter notre témoignage sur notre ami comme l'ont fait avant nous Bertrand Delanoë ou Jack Lang.

Les propos contestés de Pascal Sevran au sujet des populations noires ont suscité émotion et réprobation. Cette émotion et cette réprobation étaient, à l'évidence, compréhensibles. (A cet égard, regrettons que ses écrits aient été déformés et reconnaissons également que sa parole était sommaire).

Pascal Sevran a rapidement présenté des excuses sans ambiguïté, expliqué combien la réalité de la famine lui était insupportable et regretté que l'Afrique ne soit pas mieux soutenue, notamment par les pays riches, dans sa lutte contre les maladies et la mortalité infantile. Il a, par ailleurs, entrepris de se rapprocher des associations qui avaient condamné ses propos. Il a ainsi rencontré le président de SOS Racisme qui l'a trouvé «atterré et digne». A l'issue de leur entretien, Dominique Sopo a proposé à l'animateur de France 2, qui en a accepté le principe, d'effectuer un reportage en Afrique afin d'apporter un éclairage sur la situation de ce continent trop souvent supplicié. On peut donc aujourd'hui considérer que ce regrettable incident est clos.

Les esprits étant désormais apaisés, nous souhaitons simplement apporter notre témoignage sur Pascal Sevran, notre ami, comme l'ont fait avant nous Bertrand Delanoë ou Jack Lang. On peut certes adresser à Pascal Sevran des reproches (et parfois certains d'entre nous ne s'en privent pas) : pointer par exemple ses emportements, ses postures quelque peu conservatrices, son affection immodérée pour les chansons et les accordéons, ou sa franchise coupante.

En retour, on doit lui reconnaître les qualités qui viennent en miroir de ces reproches (nous ne sommes pas non plus économes de nos compliments) : ses convictions profondes, son souci de défendre le mérite républicain et de souhaiter la fin des désordres, son acharnement sans faiblesse à mettre en valeur le patrimoine français, ses fidélités inexpugnables et sans calcul, sa sincérité. Comme chez tout homme, ses qualités sont aussi ses défauts. Et les paradoxes apparents ne constituent pas des contradictions mais dessinent le parcours d'une vie.

Il est toutefois un sujet sur lequel nous ne l'avons jamais trouvé ambivalent, jamais : c'est celui du racisme. Tout, dans sa nature et dans sa culture, le rend étranger au racisme. Lui, le fils d'une immigrée espagnole, a appris d'emblée la différence qui tient à la nationalité et grandi dans le respect de l'altérité. Lui, l'homosexuel, a éprouvé très jeune la violence invisible provoquée par la dissemblance et mené le combat contre l'homophobie quand tant d'autres se taisaient. Lui, le secrétaire d'Emmanuel Berl, a fait ses humanités auprès d'un des grands penseurs du XXe siècle. Lui, le proche de François Mitterrand, a partagé les combats contre les discriminations. Lui, l'homme de scène et de télévision, a traversé les tourbillons et les rencontres avec le public où toutes les couleurs, toutes les races, toutes les religions se mélangent, sans distinction. Lui, l'écrivain respecté, acteur et spectateur de son temps, a tenté de dire l'horreur que lui inspirent les blessures infligées à ceux qui ne peuvent se défendre. Il nous paraît donc injuste de chercher à lui coller l'étiquette infamante de raciste. A coup sûr, il ne la mérite pas.

Christian Authier, Philippe Besson, Christine Clerc, Benoît Duteurtre, France Gall, Christophe Girard, Roger Hanin, Frédéric Mitterrand, Renaud, Thierry Séchan et Denis Tillinac.

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