R2D2 a écrit :J'aime beaucoup ce que tu écris même si je ne comprends pas tout mais c'est très poétique, un peu comme pierre de caltigrade : vous avez 2 plumes remarquables et vous devriez songer à écrire de la poésie parce que ça y ressemble quand même beaucoup même si ça ne le dit (c'est un compliment que je fais là... je dis ça avant qu'on m'incendie).
J'y songe.
Mais c'est pas facile.
Entre mes élucubrations et de la poésie, c'est un peu comme entre disons
95 % des "décompositions" de Pierre Delanoe
(qui parmis ses défauts avait dans un "Ca vous dérange" -en PS- insulté les chanteurs de Rap)
et les chefs d'œuvre de Renaud.
Pierre
<< 27 décembre 2006
#1- Pierre Delanoë
James Brown est mort deux jours avant Pierre Delanoë.
Finalement c'est bien les meilleurs qui partent en premier......
Connaissez-vous Pierre Delanoë ? Non ? "Et maintenant", ça ne vous dit rien ? "A toi" ? "Les lacs du Conneymarra" ? "Stewball" ? "Fais comme l'oiseau" ? Vous me direz, quel rapport entre tous ces hits de la chanson française ? C'est simple : tous les textes de ces chansons ont été écrits par Pierre Delanoë, auteur de 5.000 tubes du même genre.
(...)
M. Delanoë peu avant de mourrir, s'est récemment fendu d'un morceau de bravoure radiophonique. Le 19 Juillet 2006, sur France Inter, durant l'émission "Ca vous dérange", animée par Nicolas Stoufflet, il était question de la musique hip-hop, vue sous l'angle "le rap, ça vous dérange ?"
Le propos de l'émission est de faire débattre deux personnalités en désaccord plus ou moins profond sur le sujet.
(...)
Hier, l'avocat du rap s'appelait Abd al Malik, jeune auteur et chanteur au succès naissant. Face à lui, au téléphone, le riant Pierre Delanoë. Présenté comme un "Monsieur" de la chanson française, ce dernier était censé représenter le point de vue opposé, celui des antis-hip-hop.
Tout a très mal commencé. Dès la première question, M. Delanoë entama sa diatribe anti-rap par un superbe "ce n'est pas de la musique, ce sont des éructations, des vociférations". Bon. Mais le plus beau reste à venir.
Ne laissant pas le temps à Abd al Malik de répondre, M. Delanoê se met à hurler littéralement dans son combiné, développant une saturation n'étant pas sans rappeler certains groupes de heavy-metal, prétextant que c'était un scandale, qu'on ne le laissait pas répondre.
Âge oblige (né en 1918, l'homme est dans sa 88ème année), la parole lui est rendue. Et là tout dérape.
Après avoir crié de toutes ses forces que l'animateur et l'invité disaient "n'importe quoi" en assimilant le rap à de la musique, M. Delanoë se fend d'une réplique qui sûrement restera dans les annales :
"Le rap, c'est une forme d'expression pour des gens primitifs, pour des gens incapables de faire de la musique".
On notera l'emploi du terme "primitif", qui fleure bon les années 1930-1940, et qui rappele, à ceux qui l'auraient oublié, que M. Delanoë a écrit bon nombre de textes pour un certain Michel Sardou, dont "Le temps des colonies", pour le coup très à-propos.
On est pas loin des déclarations sur "la bite des noirs" d'un autre GRAND MONSIEUR de la chanson française.
Un semblant de débat est alors esquissé,
porté à bout de bras par un Abd al Malik époustouflant de calme face à la haine, essayant de rappeler au vieux monsieur au bout du fil que, il n'y a pas si longtemps, le jazz aussi était considéré comme un truc de "primitifs".
L'histoire est un éternel recommencement. Face au rejet total de M. Delanoë, Nicolas Stoufflet veut sauver les meubles en diffusant un des titres d'Abd al malik, histoire de faire voir à l'autre que ce n'est pas si primitif que cela. Après avoir écouté "12 septembre 2001", M. Delanoë posera une question intéressante : "Quel est l'intérêt de faire de la prose qui ne ressemble à rien, qui n'a pas de construction ?" C'est vrai que le texte d'Abd al Malik n'est pas extraordinaire. Mais que dire des productions de Delanoë ?
Voyez plutôt :
"Il s'appelait Stewball
c'était un cheval blanc
Il était mon idole
et moi j'avais dix ans" (Stewball)
Ou encore :
"Moi monsieur j'ai fait la colo,
Dakar, Conakry, Bamako.
Moi monsieur, j'ai eu la belle vie,
Au temps béni des colonies.
Les guerriers m'appelaient Grand Chef
Au temps glorieux de l'A.O.F.
J'avais des ficelles au képi,
Au temps béni des colonies." (Le temps des colonies)
Et encore mieux :
medium_delano_goldo.jpg"Il traverse tout l'univers
Aussi vite que la lumière
Qui est-il ? D'où vient-il ?
Formidable robot
Des temps nouveaux
Il jaillit du fond de la mer
Il bondit jusqu'à Jupiter
Qui est-il ? D'où vient-il ?
Ce terrible géant
Des nouveaux temps
C'est Goldorak le Grand
Le Grand Goldorak
C'est Goldorak le Grand
Le Grand Goldorak" (Goldorak)
Oui, oui, Pierre Delanoë a écrit tout ça. Mieux, il a pondu près de 5.000 textes du même tonneau. La plupart des gens ne pratiquent pas ce type de poésie au delà de l'école primaire.
Ce serait drôle si l'attitude de M. Delanoë n'était pas révoltante. Personne n'est obligé d'aimer le hip-hop (moi même, je ne goute que très peu le rap français), et chacun peut concevoir que quelqu'un puisse ne pas aimer voire franchement détester le rap. Mais, qualifier ce qui, jusqu'a preuve du contraire, reste des productions artistiques de "primitif" rappelle les pages les plus noires de l'histoire. C'est renier totalement la culture hip-hop, qui est indéniable et parfaitement palpable. C'est oublier, ou tout simplement ignorer, que la base du hip-hop, ce sont des Mcs et un Dj. Or, qu'est ce donc que le Dj sinon un fanatique de musique, collectionneur de disque à l'oreille tellement avertie qu'il arrive à savoir quelles rythmiques et quelles mélodies peuvuent se marier au sein de son mix ? (je parle de ceux qui samplent dans le but de construire un morceaux, pas des pousse-disque de la FM ou des nightclub.)
Une question : est-ce la peur qui motive M. Delanoë ? Est-ce l'angoisse de se voir dépasser d'une bonne longueur par des petits jeunes qui, eux, ont quelque chose à dire ? Ont de vrais sujets ?
En excluant le hip-hop de la musique, M. Delanoë fait abstraction de l'engouement et de la fascination suscité par le rap auprès des "vrais" musiciens, dans le rock notamment. Les producteurs hip-hop ont été rapidement récupéré par les rockeurs. Les deux meilleurs exemples étant ceux des deux producteurs du groupe de hip-hop Public Enemy, Rick Rubin qui a été appelé par la suite par les Red Hot Chili Pepper ou Johnny Cash.
C'est vous qui étiez primaire.
NB: si la chanson française vous branche il vous reste : Brel, brassens, Benabar, Ferré, Boby Lapointe, et tellement d'autre qui sont talentueux, qui ne donne pas de leçon. >>