Conclusion

L’argot constitue un champ d’études très vaste d’une part par son vocabulaire et d’autre part par ses fonctions. En effet, en ce qui concerne le vocabulaire, bien qu’on connaisse aujourd’hui les principaux procédés de création argotique, il est possible de participer toujours à des innovations comme par exemple la verlanisation de mots argotiques. En fait, les langages particuliers gardent un peu une fonction cryptique car au début ils ne sont pas compréhensibles et dès qu’on arrive à les déchiffrer, ils ont créé d’autres choses qu’il faut à nouveau essayer de déceler. Les « langues spéciales », comme les appelle A. Van Gennep ont donc toujours une avance plus ou moins grande sur les linguistes.

La recherche sur la création de mots argotiques a été poursuivie depuis le jour où on s’est intéressé à ce style de langage et encore plus aujourd’hui pour la simple et bonne raison que l’argot est, comme tout langage, un langage qui mue : il voit ses mots se transformer, d’autres apparaître, d’autre disparaître. Il faut donc sans cesse travailler sur ce lexique pour connaître son évolution. Cette étude peut être une mauvaise chose car c’est à cause d’elle qu’aujourd’hui l’argot est connu et compris par la majorité des gens

D’ailleurs J.P. Colin et A. Carnel posent également ce dilemme dans l’article paru dans la revue « Langue Française » : est-ce une trahison de traduire un code secret, une mort d’une langue décorative et littéraire ?. Mais c’est peut-être aussi grâce à elle qu’il a perduré à travers les ans. Quoiqu’il en soit, il est très intéressant de savoir comment peuvent se former des mots, comment d’autres sont transformés, pourquoi d’autres disparaissent.

Il est également très passionnant de savoir dans quel but est utilisé ce langage. Pour Renaud, parler argot est naturel. De plus, cette manipulation du langage lui a toujours énormément plu. Il trouve là une réelle beauté de l’expression. Dans ce mémoire on a présenté dans la première partie les termes tels que l’argot, le langage familier et populaire, dans la deuxième partie les différentes formes de l’argot utilisées par Renaud : la troncation, la suffixation, les mots à préfixes, les argots à clefs et le redoublement. La troisième partie a présenté tous les emprunts qui étaient dans les chansons. La dernière partie a exposé cinq champs notionnels : l’espèce humaine, les coups, les drogues, la police et l’argent. Ces champs notionnels sont les plus répandus chez Renaud et aussi en milieu argotique.

D’après l’étude faite sur le vocabulaire argotique, on peut affirmer que Renaud n’utilise pas l’argot dans un but cryptique. En effet, les manipulations formelles qu’il privilégie sont l’apocope, la suffixation et les mots à préfixes procédés qui ne cachent pas véritablement l’origine du mot. Par contre l’aphérèse et les argots à clefs qui sont plus à but cryptique sont peu utilisés par Renaud. Ainsi, il est clair que sa préoccupation première est de se faire comprendre. On peut expliquer cette attitude du fait que Renaud est un chanteur et pour vivre, il a besoin du public. Il doit se faire comprendre car toute la beauté de ses chansons sont ses textes. Renaud veut faire plaisir aux auditeurs et leur donner un moyen de s’exprimer autre que le français standard. De plus, l’argot est le langage véritable de Renaud, parce qu’il a rencontré dans sa vie des gens de différents milieux, de différentes classes sociales, donc aussi des gens de la classe populaire. Il en profite aussi pour faire passer ses messages, pour dire ce qu’il pense. Il semble qu’il critique gentiment ce qu’il réfute. Les mots argotiques sont un masque commode pour éviter la censure.

Tout cela semble assez clair en ce qui concerne Renaud, mais peut-être y-a-t-il d’autres choses sous-jacentes enfuies dans les textes de ses chansons qui révéleraient d’autres aspects de la personnalité de Renaud et d’autres fonctions de son langage. Il faut laisser ces « peut-être » de côté qui pourraient être l’objet d’une recherche plus approfondie sur le sujet et de voir en Renaud un argotier-chanteur de premier ordre.


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