Sortie de nouvel album Fréquence ESJ, le par fr.
Mis en ligne dans le kiosque le 3 mai 2016.

Renaud : toujours debout (avec des béquilles)

CRITIQUE - 2016 est définitivement l’année maudite pour nos icônes de la musique. Entre les défunts et les épaves, il reste néanmoins quelques « sauvageons ». Renaud en fait-il partie ? Idéalisé comme le « phénix » de sa génération, il profite de cette année pour tenter de redorer la scène de ces textes teigneux qui viennent du cœur… Mais voilà, que se passe t-il quand le cerveau de l’histoire écrit sous la tremblote, quand les mots paraissent fades, vides et insignifiants ? Il ne reste alors plus grand-chose à sauver du naufrage.

Qu’est-ce donc que cela ? Un album sans véritable nom, éponyme au possible, qui comporte 13 morceaux… Une malédiction, peut-être, une erreur de parcours ? Soyons honnêtes, on peut, certes, apprécier Renaud pour l’audace et l’originalité de sa carrière, on ne peut, malgré tout, que voir un fossé au milieu de cette œuvre. Les morceaux glissent petit à petit dans un trou noir de pathos truffé de sentimentalisme totalement dépassé. Malheureusement, impossible de compter sur les textes d’un Renaud fatigué pour remonter ce baromètre du malaise.

Difficile à expliquer pourquoi il n’y aurait presque rien à sauver dans ce nouvel album. Difficile à expliquer pourquoi ces 35 minutes paraissent aussi longues que l’ascension du Mordor dans le Retour du Roi. Toujours est-il qu’il y a une lueur au tableau. Les Mots, tout d’abord, propose un texte affiné et plutôt bien écrit, qui change de l’ordinaire. Agréable, mais porté par une instrumentalisation tout sauf inspirée. En soit, on est loin des ratages complets que sont Héloise, Mon Anniv’ (rien que le titre…), La Vie est Moche et C’est Trop Court (on ne savait pas que Renaud Séchan écrivait un Skyblog), HyperCacher… Entre les sympathiques mais inoffensives J’ai Embrassé un Flic, Ta Batterie et Dylan, le meilleur de l’album est concentré en un morceau (et heureusement, le plus long) : Mulholland Drive. La référence à David Lynch est flagrante. Les paroles, poétiques et visuelles, nous peignent un joli paysage : celui d’un horizon orangé à perte de vue où vagabonds voyagent, au bord de leurs Cadillac, à l’orée d’un coucher de soleil. C’est bien beau tout ça, mais ça ne suffit pas. Ce qu’il y a de plus déprimant finalement, ce sont les arrangements. Des riffs risibles à faire pleurer nos oreilles, une batterie mollassonne (mention spéciale à Ta Batterie, où justement cette dernière devait sortir du lot… en vain), un accordéon répétitif et dépassé. Bref, une purge.

Sensiblement, on ne peut que sortir de cette écoute avec un léger sourire aux lèvres. Parce-que oui, on est contents que Renaud soit de retour, on est heureux qu’il soit toujours vivant, toujours debout et qu’il ait toujours la banane). Encore faut-il qu’il tienne la cadence, puisqu’il a l’air déterminé à tourner dans toute la France où plus de 100 concerts sont prévus. Il est peut-être remis sur pied, même les plus objectifs avoueront que sa voix en studio est modifiée à la note près. Ce dernier point noir peut nous faire frémir et prévoir un four pour le live. Espérons alors que les musiciens sauront soutenir leur papa, qui vacille encore, même après la détox.

TRACKLIST – Renaud – dans les bacs depuis le vendredi 15 avril 2016

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