Renaud bave
Renaud n'écrit plus, ne crie plus, ne crée plus: il bave. Sur moi. Si baver sur moi peut l'aider à retrouver l'inspiration, surtout qu'il continue à le faire et nous offre de nouvelles chansons dignes de ce nom, de son nom.
Où bave-t-il sur moi ? Dans le N°2 de Serge. Il répond à diverses questions. L'une concerne, Renaud briographie, l'ouvrage que je lui ai consacré, paru chez Flammarion.
La bave :
- Serge : La politique est au centre de la biographie écrite par Christian Laborde (Renaud - Briographie), notamment sur les liens de certains membres de votre famille avec l'extrême droite...
- Renaud : Je lui ai parlé de secrets de famille en lui disant que c'était off record et il les a publiés. Tout ce que je lui ai raconté sur ma carrière et mes chansons, il l'a un peu zappé. Il s'est répandu sur le passé de mon grand-père qui était militant communiste mais qui a mal viré pendant la guerre en étant pour Jacques Doriot, le collaborateur, créateur du Parti populaire français. Il est allé chercher les arguments dans un ouvrage sorti par une officine d'extrême droite. Il a raconté aussi en long et en large que mon père était un collabo. Alors que pendant deux ans, il n'était qu'un obscur traducteur d'allemand à Radio Paris au cinquième sous-sol, où il ne traitait que de nouvelles d'informations générales et rien qui eût trait à la guerre. Tout ça m'a valu de me faire traiter de petit-fils de SS.
Mise au poing:
1) La question de Serge.
Où le journaliste a-t-il été cherché que mon livre serait "politique". Mon livre n'est que poétique. Il raconte la naissance de Renaud (l'accouchement de sa maman), la vie de Renaud, puis les funérailles de Renaud. Entre le moment où il naît et celui où son cercueil est porté par ses fans, défilent des variations paragraphiques dont l'une évoque la rencontre de son père et de sa mère à Radio-Paris (radio du gouvernement de Vichy) et le saut fait par le grand-père communiste chez Doriot, collaborateur venu lui-même du Parti communiste. Donc, deux pages sur le "passé" de son père et de son grand-père, et trois cents pages sur Renaud, sa route, son répertoire.
2) La réponse de Renaud.
Renaud ment. Il a tenu à me raconter le passé de sa famille en me demandant de le raconter à mon tour dans le livre. J'ai marqué mon étonnement. Pourquoi porter à la connaissance des lecteurs et de son public ces éléments? Réponse de Renaud: " Je souhaite que tout soit clarifié, j'en ai assez de me faire traiter de fils de collabo." J'ai donc raconté, en quelques lignes, ce "passé" qui n'a, me semble-t-il, rien d'accablant. Et, dans les les quelques lignes que je lui ai consacrées, les lecteurs ne verront ni charge, ni jugement. J'ai d'ailleurs eu au téléphone, après publication du livre, la maman de Renaud: elle sait mon honnêteté dans cette affaire.J'aurai été cherché mes "arguments" du côté de l'extrême-droite. Mais il n' y a pas d'arguments dans les quelques lignes incriminées: il y a juste ce que Renaud m'a raconté. Quant à l'ouvrage dont parle Renaud, ouvrage cité dans mon livre, c'est Renaud qui m'avait demandé de le lire parce qu'il était, je le cite " excellent, rien à voir avec les bouquins écrits par des fans." L'ouvrage en question est sorti chez L'Harmattan. J'ignorais que cette maison d'édition était une "officine d'extrême droite".
3) La publication
Lorsque le texte a été terminé, je l'ai évidemment envoyé à Renaud. Pour qu'il le lise. Me fasse part de son avis. Il l'a lu. L'a aimé et m'a demandé de le passer à Thierry, son frère, afin qu'il le lise à son tour. Thierry l'a lu, l'a aimé. Thierry, je l'ai rencontré, nous avons parlé de Renaud, du texte, et du paragraphe concernant le "passé". Thierry m'a dit que tout était clair, tout était net: je pouvais remettre le manuscrit à Flammarion. Et c'est Thierry qui a trouvé, dans les archives familiales, la photo qui figure en couverture du livre.
4) Question:
- Pourquoi ce mensonge de Renaud, cette bave de Renaud, deux ans après la publication d'un livre dont la presse a souligné l'originalité ?
5) Remarque(1):
Je me serais "répandu" à propos du "passé" du père et grand-père de Renaud. Lors de la "promotion" du livre, je n'ai fait aucune remarque sur ce passé, aucune question ne m'a été posée à ce sujet. J'ajoute: dans aucun article consacré à mon livre il n'est question de ce "passé". A aucun moment dans le livre, je n'emploie l'adjectif "collabo". Ce n'est pas ainsi que je regarde la famille de Renaud. Bref, le seul à se répandre sur le passé de sa famille et à le qualifier de "collabo", c'est Renaud lui-même.
6) Remarque(2):
Contrairement à ce qu'il affirme, Renaud ne m'a guère parlé de son ½uvre. J'avais mon regard sur elle, et c'est à partir de ce regard que j'ai construit mon livre. Par contre, à chacun de nos entretiens, Renaud me parlait de ses tourments, me confiait des éléments extrêmement personnels, intimes. Et son impudeur parfois me mettait mal à l'aise. Avec tout ce qu'il m'a confié à propos de sa vie et de son couple, j'avais la matière idéale pour faire un "roman TF1", un récit"Ici Paris". J'ai préféré faire ce que je sais faire: de la littérature.
Je plains Renaud.