A quoi sert la presse musicale ?
A quoi sert la presse musicale ?
En gros, vous vous demandez pourquoi vous existez et comment vous pourriez exister mieux. Je nai pas de réponse à la seconde question (que je ne me pose pas), ni à la première (que je me pose aussi parfois...).
La presse musicale est un produit de consommation destiné à promouvoir ces autres produits de consommation que sont les disques, les concerts, et parfois même les artistes. Ses critiques sont forcément subjectives, ses interviews complaisantes, ses reportages superficiels et son prix élevé.
Pour ne parler que de Paroles et Musique (puisque cest, je crois, le sujet qui nous intéresse), je ne vous cache pas que je regrette un peu lancienne formule. A vouloir traiter tous les genres musicaux, vous nen traitez aucun à fond : les fans de rock ne sy retrouvent pas et préféreront toujours Best ou Backstage ; les fans de hard, de new age, de jazz ou de musique classique achèteront des revues plus spécialisées ; quant aux amoureux de chansons vivantes, dont je fais partie, ils ne se retrouvent guère dans ces pages entières consacrées aux falsificateurs de tout poil qui sautoproclament phénomènes de société parce quils nous ont fait danser un été.
Les bidon, qui sont à Brassens ou à Cabrel ce que Pagny est à Sardou, ou Patricia Kaas à Edith Piaf, méritent-ils les mêmes critiques un peu trop nuancées (pression des maisons de disques aidant...) que vous leur adressez ? Ils ont leur journal, Top 50 Magazine. Parlez-nous plutôt de Sarcloret, qui est la plus belle invention suisse romande depuis linvention du trou de gruyère ; de Ricet Barrier, qui a fait une télé en vingt ans de carrière ; de Font et Val, qui nen ont jamais fait, sous aucun régime et sur aucune chaîne.
Vous avez, je pense, perdu le lectorat un peu intello de vos débuts (branché chanson à texte, même si parmi les chanteurs à texte, il y a bon nombre de casse-bonbons), et vous navez jamais attiré le lectorat de Rock & Folk, ni celui de Hit ou de Podium.
Le rachat de votre journal, il y a deux ans, par un groupe de presse, nest pas étranger à cette dérive. Les couvertures aux titres racoleurs (Argent et showbiz, Sida et showbiz, Drogue et showbiz, etc.) ont pu donner un temps lillusion aux marchands que vous seriez une bonne affaire. Il semble que lon déchante aujourdhui... Ya quà appeler tapie.
Et puis je dois vous avouer une chose : je nai jamais fait de différence entre la presse musicale et la presse en général. A part quil est rare quun mensuel quelconque me consacre quinze pages comme la fait Paroles et Musique... Sinon, chaque journal (quil soit quotidien, hebdomadaire ou mensuel) a sa rubrique musique ou spectacle. Mes rapports avec les journalistes qui tiennent ces rubriques sont plutôt ordinaires. je refuse une interview, mon spectacle sera nul et mon disque médiocre ; je laccepte, je suis le plus grand du monde. Je généralise un peu, tous nont pas cette attitude...
Rock & Folk, Actuel, Rolling Stone sont des journaux qui mont superbement ignoré depuis quinze ans, parfois égratigné. Je nen ressens ni aigreur ni amertume, ayant définitivement admis que je naurai jamais le talent dAlain Bashung ou Stephane Eicher (Dieu me tripote !).
Quant à la presse pour ados, elle a été très cool avec moi tant que jai accepté les reportages photos (en tournée, chez moi, en studio...). Du jour où jen ai eu marre, les couvertures sont devenues plus rares.
Que vous dire de plus ? La disparition de Paroles et Musique ferait malgré tout autant de peine à lauteur-compositeur que je suis un peu, que celle de Pêche Magazine au pêcheur que je suis beaucoup
Renaud