Portraits La Presse, le par ca.
Mis en ligne dans le kiosque le 21 octobre 2000.

Renaud : un succès monstre

> La Presse du Mercredi 25 janvier 1989

Renaud : un succès monstre
Lavoie, Denis

Excitante performance d'un Renaud drôlement provocateur, hier soir, au théâtre Saint-Denis. Le chanteur français a en effet osé ranimer la flamme nationaliste par une habile allusion à la loi 101, arborant sur scène le fleurdelisé. Il a poussé l'audace jusqu'à suggérer sa propre version de la loi 178 : «Le français en dedans et les Anglais dehors!». Humour mordant, incisif, qui n'a pas manqué de séduire.

Truffé de commentaires très à propos, malicieux à l'occasion, comme sa dédicace de la chanson Miss Maggie «à la seule vraie grosse maudite Anglaise», le spectacle de Renaud était exceptionnel.

Renaud a su faire vibrer la corde nationaliste des spectateurs qui ont allumé leur briquet à quelques occasions, chose qu'on voit rarement ailleurs que dans les shows rock. Mieux que bien d'autres, il a su tirer un habile profit de l'actualité québécoise, se plaisant même à commenter les manchettes de La Presse d'hier.

Acclamé dès son entrée en scène, Renaud Séchan devait causer abondamment, avec beaucoup d'humour, pour finalement donner un amusant spectacle, un délicieux divertissement.

Il a chanté la plupart des chansons de son plus récent microsillon, y compris la chanson-titre Putain de camion, débutant le spectacle par Cent ans, pour le conclure dans un deuxième rappel avec Jonathan. Le public, enthousiaste, en aurait voulu encore plus, l'acclamant debout.

Mieux qu'un simple récital de chansons ou qu'un spectacle à grand déploiement d'effets spéciaux, le spectacle de Renaud se présente comme une rigolade... Engueulades avec les trois choristes et savoureux propos chers aux Québécois ont agrémenté sa performance.

Sympathique, donc, cette rencontre avec un artiste français qui sait amadouer un public pourtant gagné à l'avance. Personne ne se risquerait à le traiter de «maudit Français», après qu'il nous ait soulevé par des «propos quasiment racistes» et qu'il se soit aventuré à se dépeindre comme «farouche partisan de l'indépendance du Québec».

Il se risque donc à pousser des chansons comme En cloque, faisant bien comprendre ce qu'il veut exprimer, dédiant à sa femme et sa fille présentes Me jette pas. Et après avoir passé les Anglais au vitriol, c'est dans leur langue, «maganée», il est vrai, qu'il a entonné son It is not because you are. Parmi les chansons plus anciennes se glissait aussi Hexagone. Il faut d'ailleurs ajouter que l'artiste n'a pas été plus tendre à l'endroit de ses compatriotes.

Renaud a été tout simplement touchant, d'un charme irrésistible, faisant oublier son côté sombre par un humour dynamique qui a humanisé sa performance de plus de deux heures.

Devant le succès qu'obtient le spectacle de Renaud, on a décidé d'ajouter une dernière supplémentaire, le dimanche 29 janvier.

(Il y a une illustration dans l'article original) Renaud, hier soir, au Théâtre Saint-Denis. -- PHOTO ROBERT MAILLOUX, La Presse

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